Bientôt la guerre civile ?

Lors de son voyage au Nigéria du 6 avril au 1er mai 2021, Franklyne Ogbunwezeh, expert CSI de l’Afrique, a confirmé nos craintes : la violence islamiste se répand dans tout le pays. Le risque d’une guerre civile imminente doit être pris au sérieux.

Lors du rassemblement « persecution.ch » à Berne, Franklyne Ogbunwezeh a présenté avec réalisme les dangers qui règnent pour les chrétiens du Nigéria. csi

CSI : Sur la chaîne de télévision nigériane Linda Ikeij TV, vous avez déclaré que vous n’aviez jamais vu autant de haine et de violence au Nigéria.

Franklyne Ogbunwezeh : C’est vrai. L’insurrection de Boko Haram a déstabilisé le Nord-Est. La peur est également omniprésente dans le centre du Nigeria, où les islamistes peuls tuent les chrétiens. Dans le Sud-Est, il y a des efforts sécessionnistes qui ont dégénéré, la violence est partout : selon divers rapports, la police et l’armée se rendent coupables de violations des droits de l’homme. Dans le Sud-Ouest, également, les gens veulent faire sécession. Des kidnappings ont lieu un peu partout et les demandes de rançon se multiplient.

Même par le truchement des médias, les tribus s’invectivent mutuellement. Si les Nigérians ne trouvent pas le moyen de mettre un terme à cette explosion de haine, un génocide pourrait être imminent. Je vous rappelle que le génocide de 1994 au Rwanda a également été précédé par des années de rhétorique dégradante des Hutu à l’encontre des Tutsi. Je vois de sérieuses similitudes avec ce qui se passe actuellement sur internet et sur les réseaux sociaux.

La guerre au Rwanda était principalement un conflit ethnique. Dans quelle mesure le terrorisme islamiste est-il lié à la violence ethnique ?

Le terrorisme islamiste exacerbe les conflits ethniques. De nombreux Nigérians ont perdu toute confiance dans le gouvernement en tant que garant de leur sécurité. Et la situation n’est pas seulement dangereuse pour le Nigéria. Si le Nigéria implose dans l’anarchie ou la guerre civile, toute la région de l’Ouest africain sera rapidement concernée. Cela déclencherait un exode vers l’Europe.

Le gouvernement nigérian ne devrait-il pas intervenir ?

Le gouvernement est faible. La peur règne dans tout le pays. Et les citoyens les plus craintifs sont susceptibles d’être utilisés comme des armes politiques. Ajoutez à cela le fait que le nombre d’armes détenues par des acteurs non étatiques augmente rapidement au Nigéria. Le président Muhammadu Buhari n’a peut-être pas créé les problèmes. Mais son incompétence et sa pratique du népotisme ont élargi les clivages et plongé le pays dans un bourbier où règnent la peur et la frustration.

Êtes-vous devenu plus pessimiste à propos des chrétiens du Nigéria depuis votre voyage ?

En tant qu’Africain, je suis une personne optimiste. Malgré toutes les souffrances que j’ai vues au Nigéria, il y a des raisons d’espérer. Quelque 70 % des Nigérians sont des jeunes de moins de 30 ans. Je pense qu’avec une bonne organisation politique, le potentiel de cette jeune génération pourrait se déployer de telle manière que le Nigéria et d’autres États africains deviendraient des pays florissants. Mais tant que ce n’est pas le cas, il est impératif que CSI attire l’attention sur la persécution des chrétiens et des musulmans modérés ainsi que sur ses conséquences possibles.

Interview : Reto Baliarda

Lors du rassemblement « persecution.ch » à Berne, Franklyne Ogbunwezeh a présenté avec réalisme les dangers qui règnent pour les chrétiens du Nigéria. csi
Lors du rassemblement « persecution.ch » à Berne, Franklyne Ogbunwezeh a présenté avec réalisme les dangers qui règnent pour les chrétiens du Nigéria. csi

 Franklyne Ogbunwezeh s’est exprimé à Berne

Lors du rassemblement « persecution.ch » organisé par le Groupe de travail pour la liberté religieuse (GLR) du Réseau évangélique suisse (RES), Franklyne Ogbunwezeh a fait état de la souffrance des chrétiens nigérians le 21 août 2021 sur la Münsterplatz de Berne. Dans aucun autre pays, il n’y a autant de chrétiens tués qu’au Nigéria. Malheureusement, la sœur de notre collaborateur fait partie des nombreuses victimes : « Elle est morte dans une attaque terroriste de Boko Haram », nous a-t-il raconté.

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