Le Nicaragua s’enfonce dans le chaos

La population du Nicaragua est livrée à une vague de violence perpétrée par les troupes gouvernementales. Plus de cent personnes ont déjà perdu la vie. Les procédés cruels employés par le gouvernement inquiètent profondément les partenaires de CSI sur place.

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Le peuple en a assez ! Après des protestations pacifiques contre les réformes du président Ortega, on exige sa démission dans tout le pays. (wiki)

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Dans le courant du mois d’avril 2018, le chef d’État Daniel Ortega (ancien dirigeant révolutionnaire) a annoncé une nouvelle réforme des retraites, à tel point controversée qu’elle a déclenché des manifestations. M. Ortega n’avait même pas soumis la réforme aux législatives.

La corruption sévit

Lorsque Daniel Ortega a annoncé cette réforme, il ne s’attendait pas à une réaction aussi violente de la population. Depuis sa réélection il y a environ onze ans, son mandat a été marqué par d’innombrables faits de corruption :

Expropriations arbitraires dans le cadre d’un projet douteux concernant la construction d’un canal, augmentations de prix et licenciements dans le secteur public.

De plus, toute réelle opposition a été systématiquement empêchée, les élections ont été manipulées sans scrupules, le népotisme s’est exercé sans vergogne, la justice est sous le contrôle de l’État, les cotisations sociales sont continuellement augmentées tandis que parallèlement des prestations sociales sont supprimées. Toutes ces réalités et bien d’autres encore ont contribué au mécontentement croissant de la population qui supporte ces injustices depuis trop longtemps.

Même le Conseil supérieur des entreprises privées (COSEP) ne trouve plus opportun de collaborer avec le gouvernement. Pendant de nombreuses années, contrairement au Venezuela allié avec Ortega, les entreprises pouvaient poursuivre leurs affaires sans être inquiétées, tandis que le clan Ortega s’enrichissait de son côté, en utilisant souvent des moyens illicites. Le 31 mai 2018, le COSEP a lancé un appel pour arrêter la violente répression policière contre les manifestations et chercher une solution pacifique en vue d’une sortie de crise. Ainsi, les entreprises se sont rangées du côté des partis d’opposition, des organisations internationales et des groupes pour la défense des droits de l’homme. En effet, l’ONU et l’Organisation des États américains (OEA) ont exigé eux aussi le renoncement à la violence, la mise en route de négociations, le droit aux manifestations et le rétablissement de la liberté d’expression pour les médias.

De nombreux morts et blessés – des arrestations arbitraires

Actuellement une grande partie de la population manifeste violemment son mécontentement accumulé depuis plusieurs années. Au départ, les protestations avaient commencé paisiblement à la mi-avril 2018, mais le gouvernement les a immédiatement réprimées avec violence. Selon les indications de groupes des droits de l’homme, bien plus de cent personnes y ont laissé la vie. Nombreux sont ceux qui ont été arrêtés sans raison valable, parmi lesquels surtout des étudiants. On ne peut évaluer le nombre de personnes qui sont encore portées disparues.

La démission d’Ortega est exigée

La population ne se sent plus du tout en sécurité, car à tout moment chacun peut être arrêté. Au milieu de ce chaos, on déplore des pillages dans tout le pays… et la violence incontrôlée se répand. Partout, des voix exigent la démission de Daniel Ortega et de son épouse, la vice-présidente Rosario Murillo. Mais l’un et l’autre ont déjà annoncé qu’ils ne démissionneraient pas. On peut donc s’attendre à ce que le pays tout entier soit bientôt paralysé et qu’il y ait un coup d’État.

Sœur Guadalupe : « Le couvent est surveillé jour et nuit. »

Depuis plus de vingt ans, Christian Solidarity International (CSI) soutient, au Nicaragua, le travail de nos partenaires locaux qui se sont fixés dans quatre endroits différents parmi les habitants des bidonvilles. Chaque jour, les religieuses offrent un repas chaud à plus de quatre cents enfants et personnes âgées. Elles distribuent régulièrement des colis de nourriture et des médicaments à des familles extrêmement pauvres, donnent des uniformes et des fournitures scolaires, gèrent deux garderies, deux écoles primaires et deux foyers pour filles. Mais avant tout, avec leur gentillesse, elles apportent beaucoup de lumière et d’espoir dans le quotidien souvent misérable des habitants des bidonvilles.

Les troubles actuels inquiètent aussi nos partenaires, d’habitude intrépides. Dans un courriel adressé à CSI, sœur Guadalupe décrit son effroi : « Nos jeunes étudiants sont assassinés. L’Église est attaquée, étant accusée de complicité avec les étudiants. Des centaines d’entre eux ont été enlevés et certains déjà tués, d’innombrables sont portés disparus. Pour l’instant, c’est déjà un crime d’être simplement un étudiant. Nos couvents sont surveillés vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour observer exactement qui entre et qui sort. Des maisons sont incendiées, les marchés pillés… »

Bouleversée, sœur Guadalupe évoque également la fête des Mères du 30 mai dans la capitale de Managua : « Ce jour-là, il y a eu une manifestation pacifique des mères qui ne savaient pas où étaient leurs enfants récemment enlevés par les forces anti-émeute. Tout à coup, on a vu un grand déploiement de policiers. Ces derniers ont ouvert le feu dans la foule et ont mortellement touché dix-neuf étudiants qui marchaient en tête de la manifestation. D’innombrables autres personnes ont été blessées. »

Sœur Guadalupe craint également que tout le pays soit paralysé. Déjà aujourd’hui, beaucoup souffrent de la faim car toute vie s’est arrêtée et personne n’ose plus sortir de chez soi. Nos partenaires font partie du peu de personnes qui ont encore le courage de descendre dans la rue. Elles collectent de la nourriture et la distribuent aux familles pauvres. Une fois de plus, ce sont elles qui sont proches de la population et traversent cette période difficile avec elle.

La responsable CSI pour le Nicaragua

 


Du dirigeant révolutionnaire victorieux aux président mal aimé

Le président Daniel Ortega a marqué les cinquante dernières années du Nicaragua comme personne d’autre. Dans les années 1960, il s’est joint à l’organisation socialiste de guérilla Front sandiniste de libération nationale (FSLN). De 1967 à 1974, il était incarcéré et a été ensuite transféré à Cuba. En 1976, il est rentré au Nicaragua et est devenu un des « Comandantes » des sandinistes. Sous la direction militaire de son frère Humberto, Ortega et d’autres membres du FSLN ont renversé le dictateur de l’époque Anastasio Somoza Debayle. À partir de juillet 1979, Daniel Ortega a régné sur le Nicaragua à la tête d’une junte gouvernementale. De 1985 à 1990, il a été officiellement élu chef d’État du Nicaragua. Après trois échecs électoraux successifs en 1990, 1996 et 2001, il a été réélu le 5 novembre 2006, confirmé dans sa fonction le 6 novembre 2011 et de nouveau le 7 novembre 2016. Mais il est en train de faire tomber son pays dans une profonde crise.

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