22 juin 2017

Le syncrétisme religieux fait le malheur des chrétiens

Dans les régions rurales du sud du Mexique, il y a régulièrement des attaques contre les chrétiens réformés. Cela surtout parce qu’ils refusent de prendre part aux rituels païens qui continuent à être pratiqués en dépit de la christianisation.

Des membres de l’Église évangélique menacée de San Juan. Alonso Silva (au milieu, en haut) a été jeté en prison par des villageois. Guadalupe Aragon Reyes (à droite, en haut) a été enfermée pendant trois jours avant d’être chassée du village. (wwm)

 

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Le 7 janvier 2017, le jeune chrétien Juan Gabriel Lopez Perez a été emprisonné pendant trois jours à Rancheria el Encanto (État de Chiapas). Cet homme qui appartient à une Église pentecôtiste a été mis sous pression par la communauté villageoise pour qu’il mette de côté sa foi en participant à des festivités à caractère traditionnel. Lors de telles fêtes, des coutumes païennes ancestrales sont fortement mélangées avec des éléments chrétiens. Elles finissent du reste souvent en beuveries. En raison de sa foi, Juan Gabriel ne peut pas approuver ces fêtes et il s’en tient donc à l’écart. Sa famille a déjà été privée de l’approvisionnement en eau et de soins médicaux ; par ailleurs, ses enfants n’ont plus pu fréquenter l’école du village.

Mais cet homme de 28 ans s’est accommodé des discriminations et il a même refusé qu’un représentant du gouvernement du Chiapas paie à sa place une amende pour qu’il n’aille pas en prison et que « le problème soit étouffé ».

Menacés et brimés depuis des années

L’État de Jalisco présente également un cas d’exclusion violente de chrétiens évangéliques : le 26 janvier 2016, sept familles chrétiennes ont été expulsées du village de Tuxpan de Bolaños à la suite d’un vote majoritaire. Rosa Blanca Vázquez de la Rosa, l’une des femmes concernées, se souvient de cette expérience traumatisante : « En pleine nuit, j’ai été arrachée hors de ma maison avec mes enfants. Ils nous ont chargés sur un véhicule pour nous débarquer au milieu de nulle part. » Depuis cette expulsion, la famille de Rosa Blanca et trente autres chrétiens vivent dans des bâtiments provisoires.

Ces familles chrétiennes ont été harcelées pendant plusieurs années avant qu’elles ne soient finalement chassées manu militari. En 2008, la Convention baptiste de Guadalajara (capitale de l’État de Jalisco) avait pourtant obtenu un décret permettant aux familles de rester dans leurs villages. Malgré cela, la municipalité du village a ordonné leur mise à ban huit ans plus tard.

Un pasteur est roué de coups par une foule

Même scénario à San Juan, dans l’État d’Oaxaca, où des chrétiens évangéliques ont été récemment bannis de leur village ; après avoir été mis longtemps sous pression et brimés, ils ont un jour été attaqués violemment : le pasteur de l’Église évangélique, Alonso Silva (43 ans), a été battu et mis en prison avec d’autres membres de sa communauté. Guadalupe Aragon Reyes raconte comment la foule s’est saisie d’elle pour lui arracher ses vêtements : « Ils m’ont ensuite jetée dans une cellule de prison où le pasteur gisait déjà, tout nu. Il avait l’air très mal en point et il était défiguré. »

Après sa libération, Guadalupe Aragon s’est adressée aux autorités et a demandé la libération d’Alonso Silva : « Mais ils m’ont rétorqué laconiquement que le pasteur avait été emprisonné par les villageois et non par l’État. » Les chrétiens expulsés n’ont toujours pas pu, à ce jour, retourner dans leur village ; ils vivent dans des lieux tenus secrets et ils ont souvent des problèmes de subsistance. Certains ont dû brader leur maison pour parvenir à gagner un peu d’argent !

La liberté de religion ou le maintien des traditions villageoises ?

De tels incidents ne sont malheureusement pas rares au Mexique : selon l’International Religious Freedom Report (IRFR) du gouvernement américain, en 2015, on recensait encore 70 procédures pendantes pour de telles atteintes à la liberté de religion ou des faits semblables dans les communautés villageoises. Ces attaques à motifs religieux ont lieu en priorité dans les États fédérés du sud du Mexique (Chiapas, Hidalgo, Oaxaca, Puebla et Guerrero). Jusqu’à ce jour, des milliers de chrétiens ont été chassés de leurs villages pour avoir tenu ferme à leur foi en refusant de participer aux fêtes syncrétiques. En effet, notamment dans les contrées rurales et malgré le fait qu’elles ont été christianisées, beaucoup de communautés villageoises restent attachées à leurs pratiques religieuses païennes ancestrales.

Pour cette raison, les autorités (communales, nationales et fédérales) se trouvent dans une situation de tension continuelle : d’une part, elles doivent garantir la liberté de religion inscrite dans la Constitution, mais parallèlement, la même Constitution les engage à protéger les us et coutumes indigènes des communautés traditionalistes du Mexique.

Selon l’IRFR, cet imbroglio de type juridico-religieux explique pourquoi les autorités ne réagissent que rarement, et de façon timorée, lorsqu’elles se trouvent confrontées à des attaques ou discriminations à motifs religieux dans les villages. Dans plusieurs cas, les victimes sont parfois mises sous pression pour qu’elles renoncent à déposer plainte.

En 2015, le gouvernement de l’État de Chiapas a néanmoins organisé un séminaire sur la tolérance et la diversité religieuse. Mais l’IRFR signale que des actions en justice ne peuvent que rarement être menées contre des anciens du village lorsque les brimades des chrétiens réformés sont à mettre à leur compte.

 Reto Baliarda

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