
La Suisse soutient entièrement les sanctions contre la Syrie. Ceci remet en question la neutralité suisse, le libre-échange et une longue tradition humanitaire. Car c’est surtout la population civile qui souffre des sanctions. Le 31 janvier 2017, le conseiller fédéral Schneider-Ammann a pris position dans une lettre adressée à CSI. CSI avait exigé qu’on vérifie les conséquences humanitaires des sanctions suisses et qu’on publie les résultats.
Dans une lettre du 31 janvier 2017 adressée à Christian Solidarity International (CSI), le conseiller fédéral Schneider-Ammann reconnaît que les sanctions de la Suisse ont « des conséquences négatives» pour la population civile syrienne. Cependant, il est « très difficile, dans de nombreux cas, de démêler les conséquences néfastes de la guerre civile, celles liées à la présence de l’État islamique autoproclamé et la répercussion des sanctions subies par la population civile », explique M. Schneider-Ammann. Il reste à déterminer si ces mesures coercitives économiques nuisent plus à la population syrienne que la violence des actions militaires.
En 2011, au début de la guerre en Syrie, les USA et l’UE ont imposé des sanctions économiques à la Syrie qui ont été fortement durcies au cours des mois suivants. L’ancien président des USA Barack Obama a évoqué un programme de sanctions « d’une ampleur encore jamais vue ». Ces sanctions sont un élément de l’effort politique de Washington pour obtenir de force un changement de régime en Syrie. Entre temps, les sanctions sont devenues si vastes qu’elles ne visent plus seulement le gouvernement syrien.
Alors que l’UE s’est jointe, avec ses sanctions, à la politique et aux directives de Washington, la Suisse, elle, a adopté les sanctions de l’UE dans leur intégralité le 18 mai 2011. Depuis cette date la Suisse soutient également tous les durcissements, ce qui remet en question trois piliers de la politique étrangère suisse : la neutralité, le libre-échange et la longue tradition humanitaire de la Suisse.
Avec sa lettre du 31 janvier 2017, le conseiller fédéral Schneider-Ammann a répondu à un écrit de CSI du 15 décembre 2016. CSI s’y était montrée préoccupée à l’égard des conséquences humanitaires de ces sanctions économiques, imposées sans mandat de l’ONU et ayant pour effet la punition collective du peuple syrien. Ainsi ces mesures coercitives sont éventuellement une infraction directe à l’article 33 de la quatrième Convention de Genève. À ce sujet, CSI s’est référée à un rapport de l’ONU financé par la DDC selon lequel les sanctions représenteraient « un obstacle à une livraison rapide d’aide humanitaire » et pourraient entraîner une nouvelle catastrophe « avec ses conséquences humanitaires et économiques destructrices ».
Selon le conseiller fédéral Schneider-Ammann, avec ses sanctions la Suisse réagit « à la violation gravissime des droits de l’homme », dont le gouvernement syrien s’est rendu coupable lors des insurrections du Printemps arabe. Mais les sanctions n’ont cependant pas pu entraîner une amélioration pour le peuple syrien. Au contraire, de plus en plus d’indices démontrent que les sanctions contribuent significativement à la dévalorisation de la monnaie syrienne, au chômage, à l’effondrement du système de santé publique et ainsi à l’émigration en masse vers l’Europe et dans les pays voisins.
La synergie du conflit armé et des sanctions économiques dure maintenant depuis presque six ans. Selon une estimation de l’envoyé spécial de l’ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, environ 400 000 personnes ont perdu la vie à ce jour. En même temps, les sanctions interdisent l’importation de matériaux qui seraient nécessaires à la reconstruction des infrastructures détruites du pays. Dans sa lettre, le conseiller fédéral Schneider-Ammann ne donne aucun point de repère convaincant pour démontrer que les sanctions suisses ont, dans un quelconque domaine, donné un tournant positif à la crise humanitaire en Syrie.
CSI salue largement l’engagement financier de la Suisse pour la population syrienne en détresse – engagement qui, selon le conseiller fédéral Schneider-Ammann, sera augmenté pour passer de 50 millions à 66 millions de francs en 2017. Néanmoins, CSI est préoccupée car la seule lutte contre les symptômes n’a pas produit de résultat satisfaisant pour la population civile syrienne. C’est pourquoi CSI lance un appel urgent au Conseil fédéral :
Réponse du conseiller fédéral Schneider-Ammann (en allemand), 31.01.2017 (PDF)
Lettre de CSI au conseiller fédéral Schneider Ammann (en allemand), 15.12.2016 (PDF)
Rapport de l’ONU financé par la DDC (en anglais), 16.05.2016 (PDF)
info@csi-suisse.ch | Tél. 031 971 11 45
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