Traumatisée par son enlèvement, elle jouit maintenant de sa liberté retrouvée

Abuk Aher a été cruellement maltraitée comme esclave et a souffert régulièrement de la faim. Durant onze ans, elle a dû travailler dans des conditions inhumaines pour son maître impitoyable. Elle avait perdu tout espoir de retrouver un jour la liberté.

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Avec 200 esclaves affranchis, Abuk est reconnaissante d’entendre CSI donner un message de bienvenue en cette journée de juin 2017. En même temps, elle désire raconter son terrible passé.

Battue et enfermée

Abuk se souvient des journées ensoleillées de son enfance dans le village de Mabior Angui, quand elle aidait sa mère à faire le ménage.

Un jour, elles tressaillissent en voyant par la fenêtre des Arabes déferler devant la maison. « Nous sommes sorties et nous avons essayé de fuir en courant. Mais ils nous ont saisies et nous ont terriblement battues », dit-elle avec un regard stoïque. Avec d’autres villageois, la jeune fille est enfermée pour la nuit. Le lendemain, tout le groupe doit marcher en direction du Nord. Au début de cette marche de sept jours, les ravisseurs arabes prennent la petite Abuk et procèdent à l’excision très douloureuse.

Une peur omniprésente

La déportation affecte impitoyablement les forces de la jeune fille délicate. « Mes pieds gonflaient régulièrement. J’étais souvent au bord de l’épuisement. Mais malheur à moi si les ravisseurs le remarquaient ! Une fois, je ne pouvais presque plus me tenir sur mes pieds et ils m’ont violemment battue. » Ainsi, Abuk est battue à trois reprises. Mais ce n’est de loin pas le pire. Alors qu’elle est épuisée et ne fait que trébucher, elle est encore forcée d’endurer une souffrance inexprimable : elle assiste à l’exécution de huit personnes de son village, une scène qu’elle ne pourra jamais oublier. Dorénavant, Abuk est sans cesse hantée par la peur de devoir subir un tel sort. En même temps, ses pensées deviennent de plus en plus confuses : « Je ne savais pas ce qui m’attendait. J’osais à peine y réfléchir sérieusement. »

Violée par le frère de Mohammed

Au bout de sept jours, la marche se termine dans la localité soudanaise de Daen. Là, elle est placée au service de Mohammed Assan qui a cinq épouses et une douzaine d’enfants. Comme esclave, Abuk doit chaque jour nettoyer toute la maison et laver la vaisselle. Ensuite, elle doit laver les vêtements des cinq femmes de Mohammed.

Pour dormir, Abuk doit se faire une place dans l’étable au milieu des chèvres. Il est hors de question qu’elle mange avec la famille : elle a droit à de maigres restes qu’elle avale rapidement. « Mais c’était bien trop peu. Durant toutes ces années d’esclavage, la faim m’a tenaillée en permanence. »

Abuk est régulièrement battue par son maître lorsqu’elle est fatiguée. Elle ne sait pas plus se défendre contre Mohammed que contre son frère qui la viole souvent. « Mohammed m’a aussi forcée à me convertir à l’islam. J’en avais horreur, mais je n’avais pas d’autre choix. »

Les brimades continuelles, les douleurs physiques, la menace d’autres sévices poussent Abuk dans un profond désespoir. « Je n’osais pas croire en un lendemain meilleur, ni en la possibilité d’être un jour libérée de l’esclavage. J’ai essayé de me résigner à la pensée que j’allais rester toute ma vie une esclave méprisée », raconte-t-elle en baissant la tête.

Une joie sans borne !

Un jour, Abuk apprend qu’un homme va de maison en maison pour emmener des esclaves. Cet homme passe aussi chez Mohammed. De loin, Abuk le voit parler avec Mohammed en lui remettant quelque chose. « Mon cœur a commencé à battre la chamade. Cet homme allait-il m’emmener ? En effet, Mohammed s’est dirigé vers moi et m’a dit que je pouvais partir. Je chavirais entre la joie et l’incertitude. Qu’allait faire cet homme avec moi ? »

Le libérateur d’esclaves rassemble Abuk et d’autres Sud-Soudanais dans un endroit et leur explique… qu’ils sont tous libérés et qu’il les ramène au « pays des Dinka » ! Abuk décrit ce qu’elle ressent à ce moment : « J’étais tout simplement folle de joie et je n’arrivais pas à saisir mon bonheur. »

Au cours du chemin de retour vers le Soudan du Sud, les esclaves libérés sont très bien traités par le libérateur. Abuk rayonne intérieurement et se réjouit de revoir sa patrie.

L’esclave affranchie est tellement heureuse d’être à nouveau à la maison. Elle espère pouvoir retrouver au moins une partie de sa famille. La visite de CSI-Suisse la rend particulièrement heureuse : « Je vous remercie de tout mon cœur parce que vous êtes ici. »

Reto Baliarda

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