Un fils perdu rentre chez lui

Des milices arabes ont enlevé Deng Yom Malith alors qu’il n’était qu’un petit garçon. Après des années de captivité au Nord, le jeune homme, aujourd’hui âgé de 21 ans, rentre chez lui et retrouve son père. Ils sont fous de joie !

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Quel bonheur ! Après des années de captivité au Soudan, Deng Yom Malith est rentré au Soudan du Sud, où il retrouve son père. Deng fait partie des plus de 100 000 esclaves libérés et rapatriés par CSI au cours des 20 dernières années. Il raconte.

L’histoire de Deng

« J’avais environ huit ans. C’était encore la guerre. Nous vivions à Tiitchok (État du Bahr el-Ghazal du Nord). Ce jour-là, je gardais les chèvres. Quelqu’un m’a averti que les milices arabes venues du Nord étaient dans la région, alors j’ai eu très peur. Toute la journée, je me suis caché dans la forêt. À la tombée de la nuit, j’ai finalement décidé de rentrer à la maison. Sur mon chemin, je suis tombé entre les mains de la milice.

Un Arabe nommé Sadiq m’a capturé et m’a emmené vers un groupe de prisonniers. Je pleurais, mais Sadiq a promis de me ramener chez mes parents. Nous avons donc poursuivi notre chemin. Durant le voyage, quelques prisonniers ont été abattus au hasard. D’autres ont été cruellement mutilés. J’avais terriblement peur, mais je n’osais plus pleurer ni me rebiffer.

En arrivant au village de Sadiq, j’ai demandé où étaient mes parents. Il m’a dit que cela ne servait plus à rien de penser à eux. J’ai commencé à travailler pour Sadiq, je devais garder son bétail. Il m’obligeait aussi à prier comme un musulman. Quand il était à proximité, je devais réciter une prière pour le satisfaire. Quand j’étais seul, je ne le faisais jamais. Chez moi, j’aimais aller à l’Église.

Le pire, c’était les insultes incessantes que je devais supporter de la part des enfants de Sadiq. Ils me traitaient de jengai (nègre), d’abd (esclave) ou de kafir (incrédule). Ils me frappaient souvent. Chaque fois que j’essayais de me défendre, ils le racontaient à Sadiq, qui me battait à son tour.

Un jour, je suis tombé très malade. Sadiq m’a forcé à garder le bétail malgré tout. J’ai alors décidé de m’enfuir. Je suis donc parti avec les vaches et j’ai marché, marché, sans savoir où j’allais. J’aurais préféré mourir dans la forêt plutôt que de retourner chez Sadiq. J’ai finalement rejoint un autre troupeau de bétail où j’ai travaillé les années suivantes. Je languissais de retourner dans ma patrie, mais je ne pouvais pas m’enfuir. Un jour, un autre esclave (qui appartenait aussi à la tribu des Dinka) m’a dit que des gens aidaient les esclaves à retourner au Sud. Il m’a expliqué comment entrer en contact avec eux. Quelques jours plus tard, j’étais en route vers mon pays avec un groupe d’anciens esclaves. »

Le bonheur, enfin !

De retour au Sud, il est accueilli par son père, Michael Yom Malit. Celui-ci est éperdu de joie : « Dans mon Église, nous lisons depuis des années le nom des esclaves revenus au pays. Cette fois-ci, j’ai tout à coup entendu le nom de mon fils. Fou de joie, je me suis tout de suite mis en route pour aller le chercher. Nous espérons maintenant que sa mère et ses deux frères seront aussi libérés. Ils sont encore au Nord. Leur destin est entre les mains de Dieu. »

Benjamin Doberstein


Libération d’esclaves au Soudan

Une guerre civile motivée par des raisons économiques, ethniques (Arabes / Noirs africains) et religieuses (musulmans / chrétiens et animistes) a ravagé le Soudan pendant plusieurs décennies. Des centaines de milliers d’habitants du Sud – la région chrétienne-animiste – ont été capturés et réduits en esclavage au Nord. L’accord de paix de 2005 a mis un terme à la chasse aux esclaves.

CSI a commencé à libérer des esclaves en 1995 déjà. Ces 20 dernières années, elle est parvenue à rapatrier plus de 100 000 Sud-Soudanais. On estime à l’heure actuelle que plus de 20 000 personnes sont encore esclaves. CSI persévérera jusqu’à ce que le dernier esclave soit libéré.

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